Suite aux résultats du premier tour des législatives anticipées de 2024, nous voilà finalement face à l'inéluctable choix entre la social-démocratie du Nouveau Front populaire et le libéralisme-autoritaire fascisant (voire fasciste) du RN. Le macronisme, ou plutôt ce qu'il représente, c'est-à-dire un néolibéralisme débridé incapable de la moindre subtilité dans sa gestion du système capitaliste, est en bout de course. Nous voilà au pied du mur, au fond de son impasse.
Le macronisme est une impasse
Le système capitaliste tend naturellement à la concentration des capitaux. Cela pose évidemment un problème, parce qu'une société ne peut pas tenir quand l'écrasante majorité de sa population n'a plus rien tandis qu'une poignée d'ultra-riches ont tout. Et bien sûr plus les richesses et le pouvoir sont concentrés dans les mains d'un nombre réduit d'acteurs, plus l'équilibre qui permet la cohésion de la société est fragile.
La solution de la social-démocratie est de limiter la vitesse de la concentration des capitaux par une meilleure redistribution (voire répartition) des richesses, c'est-à-dire par une gestion vaguement sociale du capitalisme permettant de minimiser les dégâts pour la majorité des gens. Cela s'accompagne également de mesures immédiates favorisant le bien-être et le vivre ensemble : luttes contre les racismes et les VSS, droits LGBTI, écologie, etc. Par opposition à une véritable émancipation qui nécessiterait une rupture révolutionnaire avec le capitalisme, c'est évidemment une sorte d'arnaque, puisqu'il s'agit de gérer les symptômes plutôt que de s'attaquer à la racine du problème, mais il n'empêche que, en particulier quand le mouvement social s'en mêle, de véritables avancées peuvent être obtenues sous la social-démocratie, et nous ne pouvons faire l'économie de la moindre victoire.
Le macronisme n'est lui en revanche pas capable de la moindre subtilité, il est dépourvu de visions à long ou même moyen termes. Tout ce qui compte c'est de s'en mettre plein les poches, et plein les poches des copains, tout de suite. Ce n'est rien d'autre qu'un système de vol en bande organisée, il s'agit littéralement de détourner de l'argent public au profit de la classe dirigeante et au détriment des services publics (éducation, santé, culture, information, social, environnement, transports, sécurité, etc.). Cela accélère bien sûr la concentration des capitaux, parfois à des vitesses phénoménales, comme ce fut le cas ces dernières années. Cette augmentation des inégalités, comme dit plus haut, entraîne nécessairement une instabilité, d'autant plus forte que l'augmentation est rapide. Face à la colère sociale, le macronisme n'a qu'une seule réponse : la répression. Il est réduit à l'autoritarisme le plus violent : on l'a vu au niveau institutionnel avec leurs innombrables passages en force à coup de 49-3 ; on l'a vu dans les rues avec la répression féroce de la contestation et la police en roue libre ; on l'a vu dans ses volontés de transformation de l'audiovisuel public ; on l'a vu dans sa caporalisation de l'Éducation nationale ; etc. C'est comme ça que le capitalisme finit systématiquement par dériver vers le fascisme, qui n'est rien d'autre que son extension nécessaire quand il est allé trop loin vers lui-même, ce qu'il fait inexorablement, par nature. Cette pente glissante empruntée par le gouvernement est savonnée par les ultra-riches au service desquels il gouverne, le grand capital lui-même, pour assurer et accélérer la descente : ainsi l'installation du chien de garde Hanouna sur Europe 1 par Bolloré avec la mission de faire campagne pour l'extrême droite ; ainsi l'extrême-droitisation du Figaro, propriété de Dassault restée jusqu'à récemment encore le journal de référence de la droite républicaine ; etc. À se retrouver si peu nombreux en haut de la pyramide, acculé seul face au peuple, le grand capital n'a d'autre choix que le fascisme, son autoritarisme et sa répression.
Ce n'était donc qu'une question de temps, et il semble que ça y est, nous y sommes. Dimanche prochain nous sommes à nouveau appelé·es aux urnes dans la plupart des circonscriptions, qui n'ont pas élu leur député·e dès le premier tour. Dans la majorité d'entre elles, la configuration initiale du second tour est une triangulaire, avec un véritable risque de victoire du RN. La majorité des représentant·es du macronisme poursuivent, comme à leur habitude à marche forcée, leur campagne “ni-ni” en surface mais en prenant bien plus de temps pour taper sur LFI que sur le RN, parfois même sans taper sur le RN du tout, montrant par là à quel point ils se sont vautrés sur leur pente glissante savonnée et n'ont aucun principe politique ou moral. Après avoir bénéficié à de multiples reprises du barrage à l'extrême droite par les électeur·ices de gauche, les macronistes semblent en majorité incapable de faire barrage elleux-mêmes quand ce n'est pas à leur propre avantage. Aucun principe politique. Aucune morale.
Le macronisme est une impasse, celle qui nous a mené·es dans la situation actuelle.
Sortir de l'impasse… ou foncer dans le mur
Dimanche donc, il n'y a qu'une alternative : se diriger vers la sortie de l'impasse avec le Nouveau Front populaire ou foncer dans le mur avec le RN.
Quoi qu'il en soit, il va falloir s'organiser et lutter. L'extrême droite et ses idées ont imprégné durablement notre société, et ce n'est pas par les urnes, même en cas de victoire, qu'on s'en débarrassera. Le mieux qui puisse nous arriver dimanche, si le Nouveau Front populaire obtient une majorité de sièges, c'est de faire un pas, plus ou moins grand, en direction de la sortie de l'impasse. Il tiendra ensuite à nos luttes sociales de dicter le rythme et le tempo auxquels nous avancerons vers la sortie, voire de choisir la direction à prendre une fois sorti·es de l'impasse, mais nous n'en sommes pas encore là… et nous n'y sommes pas préparé·es ! Cela nécessiterait que notre camp social soit bien plus fort et organisé qu'il ne l'est actuellement, ce qui signifie notamment que nous devons renforcer et unifier le syndicalisme de lutte. De trop nombreux secteurs de la production (typiquement les secteurs féminisés) ou géographiques sont des déserts syndicaux. De trop nombreuses unions locales et départementales sont en déperdition par manque de militant·es syndicalistes investi·es dans leur fonctionnement. De trop nombreuses structures syndicales manquent de démocratie et d'une véritable vie militante et collective. Mais en attendant, pour sortir de l'impasse, la première étape nécessaire, c'est déjà de faire barrage à l'extrême droite dans les urnes.
Si cela s'avérait être un échec et qu'au contraire la majorité des sièges doive aller au RN, nous nous éclaterions droit dans le mur du fond. Il nous faudrait dans ce cas commencer par nous protéger collectivement des chutes de briques en faisant preuve d'une solidarité universelle et sans faille contre toutes les oppressions et discriminations pour avoir la moindre chance de réussir à nous sortir des décombres. Seulement alors nous pourrons relever la tête et tenter de nouveau de nous sortir de l'impasse. Dans ce cas aussi, nous aurons besoin dès le lendemain des élections de nos meilleures armes contre le fascisme : des syndicats forts, unitaires, et démocratiques permettant l'auto-organisation de nos luttes sociales pour défendre et étendre nos droits et nos libertés. N'attendez pas, syndiquez-vous !
Quoi qu'il en soit donc, il va falloir s'organiser et lutter.
Et pour l'heure, l'urgence est au barrage dans les urnes.
Syndiquez-vous !
CGT : syndicalisation — Solidaires : les syndicats — FSU : je me syndique